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KV-2

Dernière mise à jour : 23 déc. 2023


Premier prototype du char KV-2 · © Auteur inconnu / Wikimedia Commons

Le KV-2 : le monstre soviétique


Mettons-nous, le 24 juin 1941, dans la peau de Franz Landgraf, GeneralMajor de la 6e Panzerdivision. Déjà deux jours que l'opération Barbarossa a débuté, et, alors que votre division traverse la Lituanie méridionale à côté de Raseiniai, vous êtes stoppé par un énorme objet métallique sur la route. Remarquant que c'est un char, vous notez également qu'il est en mouvement, et qu'il vient de détruire douze camions de ravitaillement qui tentait de passer sur cette route cruciale pour votre avancée.


S'ensuit vingt-quatre heures de lutte acharnée contre... cette unité, qui vient à bout des canons antichars de 88mm que vos soldats déploient, sans effet. Tentant la ruse, en y plaçant la nuit venue des explosifs, vous découvrez qu'il résiste en plus aux mines de proximité. Finalement, l'un de vos soldats aura la brillante idée de le faire détoner de l'intérieur avec une grenade. Un peu honteux, vous vous demandez en reprenant la route dans quoi est-ce que vous vous embarquez après avoir vu ce char qui vient de bloquer votre division de panzers (et ses quelque six mille hommes) après deux jours de combats...

Mais les mois passant, vos inquiétudes retombent. Vous n'en voyez plus aucun.




Le char de tous les records


Le KV-2, monstre d'acier qui a réellement fait subir aux troupes allemandes ce revers, n'a été produit entre 1939 et octobre 1941 qu'à 203 exemplaires. Pourquoi ce char, qui a causé tant de sueurs froides aux Allemands (Encore en Litunanie, au même moment, 20 chars KV repoussaient une autre escouade de 100 chars du 6e Panzerdivision), a été tant minimisé ? Ses caractéristiques, en action, sont monstrueuses. 57 tonnes d'acier, un canon de 152mm (le célébrissime char contemporain américain Abrams n'est équipé "que" d'un canon de 122mm), deux mitrailleuses antipersonnels, un blindage de 75mm de la caisse... Victimes de leur puissance ? La guerre d'Hiver (1939-1940), opposant l'URSS à la Finlande, a mis en évidence que ce blindé remplissait parfaitement sa fonction de démolisseur de forteresse, mais également qu'il souffrait d'un manque cruel de fiabilité. Le seul moyen de le mettre hors service était en effet de contraindre son équipage à le quitter, et donc de l'immobiliser totalement, ce qui arrivait fréquemment. Les pièces du char, par exemple, étaient sujettes à s'endommager dès que le canon tirait un obus. La boîte de vitesse se brisait également fréquemment, et enfin, au vu de son utilisation comme char de percée, il était souvent stoppé par des mines. Quelques-unes de ces unités ont été ainsi capturés par la Wechmacht et utilisés contre leurs anciens maîtres sous la dénomination St-Pzkpmfw KV-II 754.



Les concepts super-lourds


D'une manière générale, le KV-2 appartient à la classe des chars lourds ou super-lourds. Il s'agissait de choix tactiques de la part des instances militaires pendant la Seconde Guerre mondiale que de concevoir des chars extrêmement imposant, lent, avec la capacité de transporter un canon avoisinant les 150mm et plus. Ces projets ont été abordés par tous les acteurs du conflit : en France par exemple avec le FCM 2-C, char de 68 tonnes développé pendant l'entre-deux-guerres, ou encore en Allemagne, où Adolf Hitler montre un réel intérêt pour la construction de chars super-lourds. Il émergera notamment des usines Porsche à la fin de la guerre le blindé le plus lourd de l'histoire, le "Maus", "Souris", satyre des caractéristiques de ce char de 188 tonnes et de son canon de 128mm.


Le char super-lourd allemand Panzer VIII "Maus", seul exemplaire restant, conservé à Koubimka · © Auteur inconnu / Wikimedia Commons

Ces chars partagent un autre point commun : ils n'ont jamais vu le champ de bataille. Ce type de blindé, propre à la Seconde Guerre mondiale, n'avait au final comme intérêt que de remplir un rôle de " cuirassé terrestre ", avec un intérêt tactique limité de par leur lenteur et leur taille. Le KV-2 est, de loin, le char opérationnel le plus proche de cette classe de chars, et permet de souligner l'échec que représente le développement de chars plus lourds.


Ainsi, ces chars, dit de " rupture " (ils sont censés, par leur seule présence sur le champ de bataille, remporter la victoire), ont été délaissés rapidement par les Etats-Unis et l'Union soviétique, qui préférera se concentrer sur des chars fiables et puissants mais moins lourds tel que le T-34 (32 tonnes, un canon de 76mm et un blindage de 60mm), qui fût l'un des meilleurs blindés de la Seconde Guerre mondiale avec 84 000 unités produites tant par sa fiabilité que par sa rapidité et sa résistance, et a permis de renverser le cours de la guerre totale.

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